
Auteur(s) : Stéphane Titeca
Artiste(s) : Agathe Sanchez, Laetitia Richard, Régis Romele, Stéphane Titeca
Metteur en scène : Stéphane Titeca
Il en aura fallu, des jours, pour se remettre debout. Mille cent exactement. Mille cent jours pour remonter la pente, reconstruire un corps et retrouver un souffle, une trajectoire.
C’est ce que nous raconte Mille cent jours, mais pas comme on l’imagine. Ici, pas de récit linéaire, pas de pathos. On est plongé dans un espace-temps mouvant, suspendu entre morphine et lucidité, hallucination et mémoire.
Alexandre est cloué à son lit d’hôpital. Un accident, une jambe en morceaux, une opération qui tarde, une décision à prendre : couper ou ne pas couper. Il est dans le coma, mais ses pensées galopent. Et dans son esprit, tout devient théâtre. Une salade qui parle (oui, Batavia, Bat pour les intimes), un chirurgien borderline, une infirmière au bord de la crise, un frère un peu collant, une compagne sur tous les fronts… et au centre, lui, en veille prolongée, lucide malgré lui.
Stéphane Titeca, auteur et metteur en scène (Le choix des âmes ), s’inspire de l’histoire vraie de Régis Romele, qui interprète ici son propre rôle. Mais loin de la reconstitution clinique, il choisit une écriture à la fois drôle, poétique et délicieusement absurde. C’est là que réside la force de la pièce : dans ce décalage maîtrisé, cette manière de parler d’un drame sans le dramatiser, de rire sans fuir la douleur.
Sur scène, quatre comédiens pour une galerie de personnages tour à tour loufoques, tendres ou inquiétants. Mention spéciale à Régis Romele, véritable pivot de la pièce, bouleversant d’intensité et de malice. Autour de lui, Laetitia Richard, Agathe Sanchez et Stéphane Titeca tissent un ballet hospitalier où le soin, l’amour, l’impuissance et la révolte s’entrechoquent.
La scénographie est fluide, inventive, traversée de ruptures visuelles et sonores. L’univers de l’hôpital devient un espace mental, parfois drôle, parfois cruel, jamais figé. On glisse d’un registre à l’autre sans prévenir : on rit , puis l’émotion surgit sans qu’on l’ait vue venir.
Mille cent jours, c’est un récit de résistance, un monologue éclaté porté par une polyphonie scénique. Une pièce sur la douleur, oui, mais surtout sur la vie, dans toute son incohérence magnifique.
Une pièce, une histoire de résilience à découvrir sans tarder.
Agnès Guéry pour Passion théâtre

